Le Wootz
A l’origine était le Wootz
Le wootz, également connu sous les termes de wootzer ou wûtzer, représente une variété d’acier indien ayant jadis occupé une place prépondérante dans la fabrication de lames de sabre. L’appellation « wootz » dérive probablement du marathi « ũc », altération du mot « wook » utilisé par le botaniste Benjamin Heyne, lui-même emprunté au kannara ukku, signifiant tous deux « supérieur » dans différentes langues du sud de l’Inde et désignant l’acier.
Origines et Renommée de l’Acier Wootz
L’acier wootz se distingue comme l’un des premiers aciers au creuset, dont la production remonte environ à 300 av. J.-C. Sa renommée s’étendait largement dans la région, atteignant une notoriété particulière au Moyen-Orient, où il était célèbre sous l’appellation d’acier de Damas. Les lames issues de cet acier, appelées « lames de Damas », étaient réputées pour leur extrême dureté.
Cependant, la rareté de l’acier de Damas original a conduit à une utilisation courante du terme « Damas » pour désigner essentiellement des Damas de corroyage. En réaction, les aciers de type wootz sont parfois qualifiés de « vrai Damas ».
Composition et Caractéristiques de l’Acier Wootz
Le wootz se caractérise par une concentration élevée en carbone, variant entre 1,3 et 2,2%. Sa particularité réside dans la présence de cémentite sphéroïdale (carbure de formule Fe3C), qui est grossière dans les lingots de wootz, mais fine lorsque le métal est forgé dans des conditions optimales pour la fabrication de lames. En plus du carbone, l’acier wootz comporte divers éléments d’addition tels que le chrome, le molybdène, le niobium, le manganèse et le vanadium, ce dernier jouant un rôle crucial dans l’obtention des motifs distinctifs de Damas.
Fabrication du Wootz
La production de wootz s’est probablement éteinte au XVIIIe siècle en raison de l’épuisement du minerai essentiel. Les étapes de fabrication se déroulaient en trois phases :
- La première phase consistait en la réduction de l’oxyde de fer présent dans le minerai, réalisée par les forgerons indiens dans des bas fourneaux. Le résultat, appelé « loupe », nécessitait un martelage pour éliminer les scories et obtenir un métal plus homogène.
- La deuxième phase, au cœur de la fabrication du wootz, se déroulait dans un creuset conique où un mélange de fer, de métal déjà transformé, de charbon de bois, de verre et de feuilles était chauffé. Quinze creusets étaient empilés dans un puits rempli de cendre, et la combustion produisait des températures entre 1 300 et 1 400 °C. Les feuilles vertes favorisaient la carburation, le verre protégeait le métal de l’oxydation, et le forgeron écoutait le clapotis de la fonte en fusion pour déterminer la qualité de l’acier.
- La troisième phase était celle du refroidissement lent, crucial pour assurer une répartition homogène du carbone dans la phase austénitique de l’acier. À partir de 1 000 °C, la cémentite commençait à précipiter, mais c’est le forgeage ultérieur de la lame qui conférait une morphologie fine aux précipités.
Le forgeage du lingot, après son refroidissement, nécessitait plusieurs cycles de réchauffage et martelage pour atteindre la transformation structurelle souhaitée. La chaleur répétée visait également à dissoudre les carbures dans l’acier, tandis que le refroidissement progressif permettait une précipitation plus fine de la cémentite.
Héritage Perdu et Résurgence de l’Intérêt
La fabrication complexe du wootz, avec ses techniques sophistiquées et son savoir-faire ancien, a connu son déclin probablement en raison de l’épuisement des filons indiens de minerai de fer contenant des éléments essentiels. Malgré cela, les travaux archéologiques et les recherches en laboratoire depuis le XIXe siècle ont préservé une compréhension approfondie de cette métallurgie ancienne. Aujourd’hui, bien que la production de lames de Damas avec du wootz ait cessé vers 1750, l’intérêt pour cette technique perdure, marquant un héritage métallurgique qui continue de captiver les passionnés et les chercheurs du monde entier.
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